Femmes migrantes et formes de discriminations plurielles

Adelina Miranda

 

Cette communication propose d'explorer les formes de discrimination subies par les femmes migrantes. Afin de saisir les articulations souvent contradictoires existant entre pratiques et représentations, nous approfondirons deux questions.

La première question est de savoir si les migrations des femmes sont-elles spécifiques par rapport aux migrations des hommes. Cette problématique sera analysée en tenant compte de la place économique occupée par les migrantes sur le marché du travail. L'activité professionnelle des immigrées est croissante, marquée par une tertiarisation des emplois (comme pour les non migrantes) mais surtout par une concentration dans les emplois moins qualifiés. Le fonctionnement du marché du travail montre que la présence des femmes à l'intérieur des processus de mobilité locale, régionale, nationale et mondiale, est traversée par la logique des rapports sociaux de sexe.

La seconde question est de savoir si les femmes migrantes subissent-elles ce que l'on appelle une double discrimination de sexe et de race. Au cours de dernières années, l'œuvre du black feminism et du postcolonial feminism a encouragé le développement d'une perspective déconstructive en migration. Ces deux mouvements, en déplaçant l'attention sur les appartenances raciales, ont dépassé la question de la domination masculine comme une condition partagée par toutes les femmes. La prise en compte de l'articulation des rapports sociaux de sexe, de classe et de « race » a illustré les différentes implications des femmes dans les sphères de la production et de la reproduction. D'une manière plus générale, le black feminism et le postcolonial feminism ont critiqué la valeur égalitaire recherchée par les féministes blanches comme étant le produit d'une vision universaliste-occidentale, qui pose le binôme femme-travailleuse comme le point de référence absolu d'un cheminement émancipatoire. Ces études on permis de saisir les différences qui traversent les processus migratoires féminines, c'est-à-dire les discriminations existant entre femmes migrantes et non migrantes et entre les différents groupes de femmes migrantes.

 

* Adelina Miranda, socio-anthropologue, est chercheure auprès de la Faculté de Sociologie, Université Federico II de Naples, et du CRESPPA-GTM, Paris. Elle est membre élu du directif RTF2 « Sociologie des migrations et production de l’altérité » et de l’AISEA (Association Italienne pour les Études Ethno-Anthropologiques). Elle assure les suivants enseignements universitaires auprès de la Faculté de Sociologie : Anthropologie de la Méditerranée, Méditerranée et mouvements de populations, Identités de genre et sociétés de la Méditerranée, Anthropologie urbaine, Anthropologie des sociétés complexes. Elle est actuellement chercheure invitée à Migrinter de Poitiers et elle a été visiting professor auprès de la Universidad Autonoma Metropolitana de México. Elle a effectué de nombreuses recherches en France et en Italie sur les mouvements de populations, sur les dynamiques culturelles migratoires et les connexions entre rapports sociaux de sexe et transformations des sphères productive et reproductive.